Alimentation du canal
Un autre problème se greffait immédiatement après le choix du tracé: trouver une quantité d’eau suffisante pour permettre les éclusages.
En effet, si une rivière possède des sources qui l’alimentent, un canal, lui, n’en a pas. Non seulement un canal ne possède pas de source propre, mais en plus, nous le verrons plus loin, il est soumis à des pertes par infiltrations vers les terres sous-jacentes lorsqu’il est en léger surplomb. Or le passage d’une péniche dans une écluse demande à peu près 300 mètres cubes sur le canal de Nantes à Brest.
Les ingénieurs doivent donc trouver un moyen d’amener de l’eau, d’une façon artificielle, dans la section la plus haute du canal, qu’on appelle bief de partage, là où le canal franchit une crête pour relier deux vallées.
A chaque fois qu’une péniche descend d’un côté ou de l’autre de la crête par une écluse, elle soustrait donc 300 mètres cubes d’eau au bief de partage.
Attention: la péniche ne consomme pas 300 mètres cubes à chaque écluse. Si on prend l’exemple d’une péniche qui descend depuis un bief de partage, elle enlève 300 mètres cubes au bief lorsqu’elle descend la première écluse, mais cette quantité d’eau s’en vient enrichir le bief inférieur. A chaque nouvelle écluse descendante, on peut considérer que la péniche traîne donc avec elle ce cubage, qu’elle fait descendre vers la vallée écluse après écluse
Quel que soit le nombre de péniches qui passent sur le bief de partage, la hauteur d’eau doit rester stable. Pour ce faire, il faut alimenter le bief par une arrivée d’eau régulière, et suffisante pour compenser les pertes en éclusage. Car un canal ne franchit jamais une crête au point le plus haut: pour éviter un trop grand nombre d’écluses, on essaie au contraire de le faire passer par le col le moins élevé de la crête.
Il y a donc toujours un point plus haut en altitude que le bief lui-même. Il existe alors deux possibilités: soit détourner une source plus haute que le bief pour l’amener par une rigole vers celui-ci, soit aménager un réservoir dans les hauteurs qui surplombent le bief, réservoir qui sera rempli par les pluies d’hiver, et progressivement vidé l’été par les éclusages.
Dans les deux cas, il faut que la rigole ou le réservoir donnent suffisamment d’eau, même en été, pour que le bief soit correctement alimenté. Nous verrons plus loin, dans l’historique de construction du canal de Nantes à Brest, que les ingénieurs ont marié ces deux techniques, rigole et réservoir, pour amener vers la voie d’eau le précieux liquide.
Cependant, lors des années de grande sécheresse, comme en 1921-1922, il a fallu interrompre la navigation faute d’eau dans le canal.
Le canal de Nantes à Brest comporte trois biefs de partage: le premier se trouve à Bout-de-Bois (altitude 20 mètres), entre les vallées de l’Erdre et de l’Isac. Le second bief se trouve à Hilvem (altitude 129 mètres), entre les vallées de l’Oust et du Blavet. Le troisième bief se trouve à Glomel (altitude 184 mètres), entre les vallées du Blavet et de l’Aulne